Vigeois en Corrèze est un des lieux les plus anciennement et justement renommés du Bas-Limousin, grâce à son abbaye, notamment où, au Moyen âge, venaient se réfugier les riches épouses des grands seigneurs, mais aussi grâce à son Vieux Pont dit "Pont des Anglais" construit au XIe siècle.
Avec la remarquable église abbatiale Saint-Pierre, classée en 1886 (voir ici) et un if fantastique d’environ 1400 ans, ce pont est l’un des attraits majeurs de la commune.
Le lit de la Vézère, peu profond à cet endroit, a facilité l’implantation des fondations du pont et sa construction en permettant le développement de Vigeois.
Autour du Vieux Pont et profitant de la Vézère, les meilleurs artisans et les plus habiles Compagnons se sont regroupés, créant un vrai pôle d’attraction composé de forges, moulins, carderies, etc. Tous utilisaient l’eau de la rivière comme source d’énergie et ses fontaines d’eau pure comme source de vie.
Le pont est long de 45 mètres, son tablier est très légèrement brisé en son centre. Il s’appuie sur quatre arches voûtées en plein cintre et ses piles se distinguent, en amont, tout particulièrement, par de beaux avant-becs en amande. En aval, les piles sont renforcées par des contreforts. Le pont est classé monument historique depuis 1969 (voir ici), avant même le remarquable viaduc des Rochers Noirs dans le même département.
Comment mieux montrer l’importance du Vieux Pont pour l’architecture médiévale qu’en rappelant le soin apporté à sa restauration selon les techniques du Moyen Age. Celle-ci, encadrée par le Conservateur régional des Monuments historiques et l’Architecte des bâtiments de France de Corrèze, a duré quatre ans, jusqu’en 2006.
Cet ouvrage protégé par son classement en raison de son intérêt historique, artistique et architectural contribue à l’attrait de Vigeois et à la fierté de ses habitants. Pourtant, récemment, la Mairie a édifié une station de pompage qui a dénaturé ses abords et dégradé l’environnement.
À moins de quatre mètres du pont, au milieu du pré contigu, a été installée une borne électrique sur une butte de terre de 2,20 m de haut, surmontée d’un monstrueux grillage de 1,80 m, sur 11,85 m de long et 9,20 m de large.
Le code du Patrimoine dispose pourtant que, dans un rayon de 500 mètres lorsqu’il y a covisibilité avec un édifice protégé, aucune construction nouvelle, transformation ou modification ne peut être réalisée sans autorisation préalable de l’architecte des bâtiments de France (ABF). L’absence de respect d’une telle obligation constitue d’ailleurs une infraction pénale selon les articles L. 621-30-1 et suivants du code du patrimoine (voir ici).
Dès lors, ne doutons pas que la Mairie, probablement peu ou mal informée, va réparer au plus vite ce préjudice, par respect pour l’histoire de Vigeois, pour son image et son avenir...
François Béchade, secrétaire général adjoint de Sites & Monuments