Lundi 11 janvier 2021
Madame la Ministre,
Acteurs de la défense et de la sauvegarde du patrimoine, nous souhaitons attirer votre attention sur la situation critique de l’ancienne chapelle Saint-Joseph, propriété de l’université catholique de Lille. Le vaste projet de restructuration immobilière conçu par cette éminente institution et dont la finalité n’est pas contestée a pris le parti de détruire ce bâtiment et de faire table rase de son emprise pour permettre de nouvelles constructions.
Or, St Joseph était une des pièces maîtresses d’un ensemble architectural universitaire initié sous Napoléon III et achevé lors du retour des Jésuites sous la IIIe République. Sa qualité architecturale spécifique aurait bien mérité que cet édifice fasse l’objet d’une protection au titre des monuments historiques. Vos services n’ont pas donné suite à une demande formulée en ce sens au double motif, d’une part que cet édifice ne présentait pas toutes les qualités requises pour justifier une instance de classement, d’autre part, qu’une simple inscription ne saurait, en tout état de cause, interdire une démolition. L’expérience montre pourtant qu’en général une telle protection conduit à une réflexion, une discussion et souvent une solution partagée préservant le patrimoine. Ajoutons que l’état sanitaire de l’édifice est passable, ouvrant à une restauration réaliste.
Nombre d’universités parmi les plus célèbres à travers le monde ont mis un point d’honneur à mettre en valeur leur patrimoine historique – quitte à changer la vocation de certains bâtiments – tout en créant des unités modernes. Elles mettent ainsi en valeur leurs racines et leur histoire tout en innovant. Cette démarche a été conduite par la « Catho » dans le secteur voisin du « palais Rameau », ancienne serre architecturale classée MH, qui a été mise en valeur au sein d’un ensemble de bâtiments modernes en construction. Pourquoi ne pas poursuivre une démarche similaire de l’autre côté de la rue alors que ces deux bâtiments ont été conçus par le même architecte, Auguste Mourcou ?
Est-il acceptable que le ministère de la Culture valide ainsi une destruction à la sauvette sans qu’ait pu être discutée une intégration éventuelle de cet édifice remarquable alors que dans de nombreux endroits à travers la France les démolisseurs sont aux aguets ou en action ?
Aussi, vous demandons-nous solennellement, Madame la Ministre, de faire organiser par une personnalité tierce une concertation qui permette d’étudier l’insertion de St Joseph dans le projet d’extension universitaire. Il s’agit non seulement de sauver un élément du patrimoine lillois, mais aussi de l’intégrer dans un projet d’avenir qui mette en valeur ses racines au lieu de les détruire.
Nous souhaitons, au-delà de ce cas lillois, que l’instance de classement soit plus largement utilisée. La maison Berweiller de Sierck-les-Bains, le château de la Horie à Grandville ou le monastère de la Visitation à Paris, notamment, sont en situation de sursis. Donner du temps à la réflexion et au compromis pour éviter l’irréparable n’est assurément pas perdre son temps.
Veuillez agréer, Madame la Ministre, l’assurance de notre haute considération.
Gilles Alglave, Président des Maisons Paysannes de France
Alain de la Bretesche, Président de Patrimoine-Environnement
Julien Lacaze, Président de Sites & Monuments
Olivier de Lorgeril, Président de la Demeure Historique
Marie-Georges Pagel-Brousse, Présidente de REMPART
Olivier de Rohan Chabot, Président de la Sauvegarde de l’Art Français
Philippe Toussaint, Président des VMF
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