L’allée du Champ de Bataille : coup de grâce annoncé

L’allée du Champ de Bataille lors de l’hiver 2017 © Collectif Champ de Bataille
L’allée du Champ de Bataille à l’automne 2018 © http://hetre.canalblog.com

L’allée du Champ de Bataille dans la ville du Neubourg était un lieu majestueux jusqu’au jour de janvier 2022 où la municipalité a fait abattre la quasi-totalité des hêtres, pour la plupart âgés de plus de 50 ans, alignés de chaque côté de son tracé long d’environ 800 mètres.

L’association Pour le Bien Hêtre d’une Allée PBHA s’est créée en novembre 2021 pour protéger l’allée des projets portant atteinte à ce patrimoine naturel, historique et culturel qui rayonne bien au-delà de la ville du Neubourg. Hélas, elle n’a pu empêcher l’abattage des arbres intervenu en janvier 2022.

Janvier 2022. L’allée du Champ de Bataille après abattage. © Collectif Champ de Bataille
138 hêtres sont abattus avant la publication de l’arrêté préfectoral. Seuls 29 sont laissés en place
pour 5 ans seulement. Ils seront abattus en 2026. © Collectif Champ de Bataille.

Cette première bataille perdue n’a pas entamé la détermination de PBHA à gagner celle menée contre la réalisation d’un parking sur cette allée qui est :

  • Inscrite à l’inventaire des Monuments historiques depuis 1934,
  • Placée à l’intérieur du périmètre des abords de trois édifices classés Monuments historiques,
  • Située en zone naturelle (ZN) du PLU de la commune,
  • Classée espace boisé protégé par l’article L. 151-23 du code de l’urbanisme.
Bosquet conservé encore 5 ans pour tenter de préserver les espèces protégées recensées par la LPO.
Ces hêtres seront abattus en 2026. © Collectif Champ de Bataille.

Ayant moins d’un an d’existence, PBHA n’était pas "recevable à agir (en justice) contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation des sols" selon l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme.
C’est pourquoi, après l’échec des recours gracieux engagés auprès d’Isabelle Vauquelin, maire du Neubourg, et pressentant l’ouverture imminente du chantier, l’un des membres du PBHA a introduit à titre personnel, un recours en référé-suspension devant le tribunal administratif de Rouen. Recours rejeté en raison du délai trop court de transmission du mémoire par l’avocat de la ville (la veille de l’audience au tribunal et quinze minutes avant au requérant).

Attendu que le référé-suspension est une procédure d’urgence tentée afin d’empêcher l’exécution immédiate d’une décision, le litige ne peut être définitivement réglé que par le juge du fond qui est impliqué dans le règlement définitif du litige. Aussi, le requérant n’a pas sollicité de report d’audience de crainte que la municipalité mette à profit le renvoi de l’affaire à une date ultérieure pour commencer et possiblement achever la réalisation du parking avant la décision du tribunal.
Un second membre de l’association a saisi, également à titre personnel, la juridiction administrative d’un recours en annulation du permis en question.
À ce jour aucune nouvelle date n’a été arrêtée pour l’audience.

PBHA fêtera son deuxième anniversaire dans quelques semaines. L’association est donc recevable, et ce depuis bientôt un an à saisir le tribunal administratif d’une requête en annulation du permis d’aménager litigieux ; ce qu’elle n’hésitera pas à entreprendre si les recours engagés par ses deux adhérents devaient échouer.

De cette situation qui a contraint deux adhérents de PBHA à se substituer à leur association —dont le recours aurait été déclaré irrecevable par le juge administratif—, découle en toute logique la question suivante : faut-il, pour neutraliser l’obligation de l’article L. 600-1-1 anticiper et créer ex nihilo des associations qui pourraient ne jamais intervenir mais se tiendraient en "embuscade" au cas où des projets d’urbanisme préjudiciables pour telle ou telle collectivité verraient le jour à un moment ou à un autre ? Au regard du vécu de PBHA et de ses adhérents dans ce dossier, cette question mérite réflexion.

L’association Pour le Bien Hêtre d’une Allée et ses adhérents, pour certains à titre personnel, ne ménagent pas leur énergie afin que la profonde blessure infligée à l’allée par l’abattage des arbres ne devienne ce coup fatal que ne manquera pas de lui porter la réalisation du parking si, par malheur, le permis d’aménager n’était pas annulé par décision de justice.

Pour le Bien Hêtre d’une Allée
collectif.champdebataille@gmail.com

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