Prix "Second oeuvre"

Cette dixième édition a été particulièrement riche par la qualité des dossiers proposés. Ils traitaient tous de restaurations fidèles, avec plus ou moins de restitutions en fonction de l’état d’origine des ouvrages présentés. Le jury a souhaité privilégier les restaurations dites en stricte conservation, les seules permettant de préserver l’authenticité et l’intégrité d’un édifice ou d’un ouvrage de second œuvre. Les trois lauréats, deux propriétaires privés et une commune, ont fait ce choix de restauration et ont retenu à ce titre l’attention du jury pour leur caractère exemplaire. 

 

Château d’Entre-Deux-Monts (Côte-d’Or)
Enduits anciens, un « épiderme » historique à sauvegarder
La façade sud avant et après les travaux © Château d’Entre-Deux-Monts

 Le dossier présenté portait sur la restauration des enduits de deux façades du château d’Entre-Deux-Monts, édifié entre le XVIe et le XVIIe siècle. Après une étude de l’état des façades, le parti adopté par la maitrise d’œuvre, sous la responsabilité de Fabien Drubigny, architecte du patrimoine, a été de privilégier la préservation des enduits anciens du XVIIe et d’intervenir uniquement sur les zones lacunaires et les reprises cimentées : celles-ci sont purgées puis reprises selon les techniques traditionnelles, avant application d’un badigeon ocre à la chaux, afin d’harmoniser les parties restaurées et les enduits d’origine. Une première tranche de travaux a permis en 2023 de valider le protocole d’intervention. Les travaux de 2024 et 2025 ont porté sur la façade ouest et la partie centrale de la façade Sud. Quatre autres tranches devraient suivre entre 2026 et 2029 pour les pavillons latéraux de la façade sud, puis pour les façades nord et est, qui pourront à leur tour retrouver leur enduit protecteur et leur aspect historique.

Commune de Marey-sur-Tille (Côte-d’Or)
Le décor intérieur de l’église Saint-Loup-de-Troyes : un livre ouvert sur le passé

 

Le décor intérieur de l’église Saint-Loup-de-Troyes avant et après restauration © L. Melsens

 Fondée au XIIIe siècle, remaniée aux siècles suivants, l’église de Marey-sur-Tille était marquée par le passage du temps. Des décors gothiques et Renaissance, des litres funéraires, des blasons étaient encore visibles, d’autres décors ont été découverts à l’occasion de la campagne de restauration de 2024. L’objectif de la maîtrise d’œuvre, dirigée par Laurence Melsens, architecte du patrimoine, a été de restaurer et consolider les enduits et badigeons anciens, de mettre en valeur les peintures murales, sans restitutions inutiles, en conservant la lisibilité des restaurations. Des objets, dont des statues classées au titre des monuments historiques, ont également été restaurés. L’éclairage a été repensé pour mettre en valeur l’intérieur de l’église. L’inauguration en mai 2025, en présence d’une nombreuse assistance, a démontré la capacité d’une petite commune à mettre en œuvre une restauration d’ampleur pour préserver et transmettre son patrimoine.

Château de Malicorne (Sarthe)
Un chantier inédit pour un exceptionnel parquet de marqueterie
Le parquet de marqueterie du grand salon avant et après restauration (gauche : © 2bdm - E. Dolmaire / droite : © Les Ateliers de la Chapelle)

 Témoin des aménagements du XIXe siècle, le fragile parquet de marqueterie de 25 m² du grand salon du château de Malicorne était en 2023 dans un état de dégradation avancé. Il a retrouvé son éclat au terme d’un chantier réalisé sous la maîtrise
d’œuvre de Frédéric Didier, architecte en chef des monuments historiques. Après un diagnostic complet du parquet, du sous-parquet et des lambourdes, qui a révélé les dommages causés par l’humidité inhérente à la proximité des douves, l’ensemble a été découpé par compartiments afin de ne pas fragiliser davantage la marqueterie, puis transporté en atelier. Le déplaquage de la marqueterie a été une opération inédite, réalisée en adaptant un protocole habituellement utilisé pour des meubles de petite taille. Après les phases de purge et traitement des bois, greffes, restitution des parties manquantes, mise en teinte des parties restituées, le parquet a été reposé sur un lambourdage et un sous-parquet neufs, et des dispositifs destinés à prévenir les remontées d’humidité ont été installés. Achevée à l’été 2024, la restauration a remis en valeur toute la finesse ornementale du XIXe dans le grand salon également restauré, contribuant ainsi à préserver la mémoire du château.