Prolifération des parcs éoliens en Charente-Maritime

Sud Ouest du 6 avril 2016

Lors des enquêtes publiques et des réunions de la Commission départementale de la nature des paysages et des sites (CDNPS), le délégué de la SPPEF n’a pu que déplorer la prolifération des parcs éoliens au détriment des riverains et des beaux paysages de plaine, les campagnes de la Charente-Maritime étant sacrifiées à l’industrie éolienne.

Éoliennes en Aunis et Saintonge

En Aunis, Saintonge et Haute-Saintonge on comptait, au 17 juin 2016, 57 éoliennes installées en fonctionnement, 21 autorisées, 76 en cours d’instruction et environ 120 projetées (voir les cartes), soit un total de 274. 

Eolien industriel au nord des Vals de Saintonge. Source Réseau Aunis Saintonge Environnement

Récemment, un projet de parc éolien en Haute-Saintonge (Allas-Bocage et Nieul-le-Virouil situés entre Jonzac et Mirambeau) a été soumis au vote de la CDNPS qui a émis un avis majoritairement défavorable. L’église de Nieul-le-Virouil est classée au titre des monuments historiques, cinq églises sont inscrites dont celle d’Allas-Bocage et d’Agudelle. Le chemin de Compostelle (patrimoine mondial UNESCO) qui traverse la commune de Nieul-le-Virouil est à moins de 1000 m d’une éolienne. De plus, 38 habitations sont à 500 ou 600 m d’une éolienne. Enfin, il y a très peu de vent (sur 22 régions le Poitou-Charentes est classée 20e). Rappelons que la géothermie utilisée par la ville de Jonzac ne génère aucune pollution, y compris visuelle.

A Villeneuve-la-Comtesse/Vergné, malgré l’avis défavorable du commissaire enquêteur et, à une très large majorité, de la CDNPS, Mme la Préfète a signé l’arrêté d’exploitation. De même, à St-Félix, au sud de Marsais, malgré l’avis défavorable d’une très large majorité de la CDNPS, M. le Préfet vient de signer l’arrêté d’exploitation du parc. En revanche, à St-Pierre de Juillers, bien que Mme la Préfète ne l’ait pas signé, le promoteur a saisi le Tribunal administratif de Poitiers qui lui a donné raison. Les éoliennes seront donc construites.

Lors de son départ en octobre 2015, Mme la Préfète a déclaré à « Sud-Ouest » : « Moi, mon maître mot, c’est l’équilibre. Pour l’éolien, par exemple, on s’aperçoit qu’à force d’accumuler les dossiers, on arrive à un niveau de saturation. On les regarde un par un ; or, si en effet un projet peut ne pas avoir d’impact, l’accumulation en aura. On doit arriver à travailler autrement. »

Dans ses avis la SPPEF dénonce les impacts négatifs de ces parcs éoliens, entre autres :

Les nuisances sur les riverains :

A titre d’exemple : sur la commune de Villeneuve-la-Comtesse, alors que les habitants des Chaumes souffrent beaucoup du bruit avec les 5 éoliennes de Migré à 700 m. de leur habitation, il est question d’un troisième projet de 6 ou 8 éoliennes de 180 m. de haut, ce qui fera au total 25 éoliennes sur 55 km2, soit 30 fois plus que l’objectif du Grenelle de l’Environnement.

Depuis qu’ils ont dû subir le bruit des machines, 86 habitants de Marsais ont adressé à Monsieur le Préfet une pétition pour arrêter la concentration de l’éolien sur Marsais : ils sont menacés à très court terme sur moins de 8 km2 par 50 machines.

Une enquête demandée par la ministre de l’Ecologie Ségolène Royal à l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) à laquelle a participé la Fédération Environnement Durable (FED) démontre qu’il existe un risque sanitaire lié aux infrasons et aux sons de basse fréquence en plus du risque lié aux fréquences audibles. Autres nuisances : effet stroboscopique dans le soleil du soir, rayons du soleil coupés à chaque passage des pales, feux clignotants dans la nuit, nausées, troubles du sommeil…

La proximité des monuments historiques :

Photo prise depuis l’entrée nord de Saint-Jean-d’Angély. L’Hôtel de Ville est à droite, les "Tours" de Saint-Jean-d’Angély, à gauche, avec l’Abbaye Royale Saint-Jean-Baptiste, étape du Chemin de Saint Jacques de Compostelle et à ce titre Patrimoine Mondial de l’ UNESCO. Au second plan, zones industrielles d’éoliennes de Mazeray-Bignay (5 machines de 125 m) et des Nouillers (5 machines de 132 m). Photo VLC Environnement

A Villeneuve-la-Comtesse/Vergné, le château du XIVe est à 1,9 km de l’éolienne la plus proche, l’église romane, à 1,5 km.

En plus de ce qui a été dit à propos des éoliennes d’Allas-Bocage et de Nieul-le-Virouil, on peut noter qu’à Cherbonnières l’une des éoliennes projetées à proximité de celles de St-Pierre de Juillers se situe à 500 m de l’église St-Martin de Juillers, du XIIe, classée monument historique et, qui plus est, à 6,5 km de l’église St-Pierre d’Aulnay inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Par ailleurs, toujours à Cherbonnières, l’Association de Protection des Habitants et des Paysages Ruraux de Cherbonnières et Environs a récemment déposé plainte après le déboisement sans aucune déclaration préalable d’un bosquet Espace Boisé Classé d’une longueur d’environ 450 m, et d’une largeur moyenne d’environ 30 m. Notons que deux éoliennes du parc projeté sont situées à proximité immédiate du bosquet déboisé. Faut-il y voir une relation de cause à effet ? De son côté, la SPPEF s’apprête à déposer plainte et à demander le reboisement de cette parcelle. Le permis de construire est en cours d’instruction. L’enquête publique n’a pas encore eu lieu.

Quant à la région de Saint-Jean d’Angély, elle est encerclée par les éoliennes à des distances beaucoup trop proches de l’Abbaye royale, étape du chemin de St-Jacques, inscrite elle aussi au patrimoine mondial de l’UNESCO. Voir les photos prises par l’Association Villeneuve-la-Comtesse Environnement : la première éolienne de Bignay-Mazeray est à 3,4 kms, la dernière, à 5,9 kms. 

Les "Tours" de Saint-Jean-d’Angély, église commencée en 1741, restée inachevée, classée au titre des monuments historiques en 1914. Photo VLC Environnement

L’article 33 bis A, introduit en première lecture par le Sénat à la demande de la SPPEF (voir ici, amendement n°6) dans le projet de loi liberté de création, architecture et patrimoine, exigeant un avis conforme de l’Architecte des Bâtiments de France pour les projets éoliens en covisibilité dans un périmètre de 10 km avec un monument classé ou inscrit ou avec un site patrimonial protégé (voir ici) a malheureusement été rejeté à la demande du Gouvernement...

Marc Fardet, délégué de la SPPEF pour la Charente-Maritime

Rochefort, juillet 2016.
marc.fardet@gmail.com