Roland-Garros et les serres d’Auteuil

L’extension programmée de Roland-Garros dans le bois de Boulogne constitue un des plus grands scandales de ces dernières années. Dans ce dossier en effet, le bien commun et la raison auront été les choses du monde les moins bien partagées... Qu’on en juge !

Face aux exigences toujours plus fortes portées par la Fédération internationale de tennis, Roland-Garros doit s’étendre, sous peine d’une disqualification, puisque le stade français est plus petit que ses rivaux. C’est la troisième fois en 30 ans, et il est difficile de croire, comme cela a pourtant été déjà dit et promis, que c’est la dernière. Une occasion unique se présentait donc de quitter Paris, et l’actuel emplacement, trop resserré, pour envisager une implantation "au vert", dans ce qu’on appelle désormais le "grand Paris". Cette occasion a été perdue, et il faut le regretter à l’échelle de l’histoire de la région capitale. Depuis Haussmann, on sait que les élites françaises ont du mal à quitter le centre de Paris.

La solution, actée par une convention signée entre la Ville de Paris et la Fédération Française de Tennis (FFT) en novembre 2011, a donc été de rester dans le bois et de grignoter de nouveaux espaces, solution qui se révèle trop serrée dès à présent. Avec cette erreur destinée à en rattraper une autre, on n’a d’autres solutions que de s’étendre sur une parcelle voisine de Roland-Garros, à l’est de l’avenue Gordon-Benett. Mais celle-ci n’est pas un terrain neutre : il s’agit en effet des serres d’Auteuil, remarquable ensemble végétal et architectural, entièrement protégé au titre de la loi sur les Monuments historiques depuis 1998, année où l’on a également protégé par un label les riches collections de plantes.

Si l’on se rappelle que le bois de Boulogne donné à la Ville par Napoléon III en 1860 est entièrement site classé depuis 1957, on trouvera étrange que la mairie de Paris n’envisage pas avec plus de respect de tels ensembles consacrés par les lois de 1913 et de 1930. Il est donc question, sans sourciller, d’y construire un gigantesque court de tennis de 4500 places, à quelques mètres des serres métalliques, œuvre de l’architecte Formigé ! Hélas, dans ce dossier, le ministère de la Culture n’a pas fait entendre sa voix, non plus que celui de l’Ecologie, et les citoyens ont vu tous les verrous sauter les uns après les autres, dans un unanimisme politique inquiétant...

Les serres de Formigé © Julie Popelin

C’est cela que la SPPEF ne peut admettre, et c’est pourquoi elle soutient un "contre-projet" chiffré, qui respecte le cahier des charges de la FFT et offre, à terme, le même nombre de mètres carrés aux joueurs comme aux amateurs de tennis. Imaginé en partenariat avec l’association " Vieilles Maisons Françaises", ce projet a été présenté à la presse au printemps dernier et fonctionne parfaitement. Il propose, plutôt que de massacrer le jardin des serres, de s’étendre sur une partie de la bretelle de l’autoroute A 13, tragique saignée qui a abîmé le bois il y a 40 ans, et qu’il est loisible de couvrir partiellement, comme on le fait de plus en plus à Paris sur le périphérique.

Un contre projet pour l’extension de Roland Garros

Le fait que ni la Ville, ni la FFT n’aient daigné engager une véritable discussion avec les citoyens, alors que ce contre-projet est à la fois moins cher et plus respectueux des lois de protection du patrimoine, tout en offrant aux responsables de Roland-Garros ce qu’il demandent, illustre hélas l’incapacité des élus comme de l’administration à dialoguer par delà les concertations en trompe l’œil, qui servent trop souvent à se donner bonne conscience.

Pour ces raisons, la SPPEF a engagé au côté d’autres associations nationales et locales un combat juridique, au moyen de recours successifs qui visent à faire échouer ce projet funeste, faute d’avoir pu l’amender. Il est certain que le sport est un élément capital dans notre société, et que le tennis mérite tout le respect possible. Mais il n’est pas moins certain que l’art, les paysages, la nature, si maltraités déjà dans ce secteur de Paris (où l’on vient de raser un monument protégé, la piscine Molitor), sont aussi dignes du plus grand respect !

Aidez nous à protéger cet espace inestimable en adhérant à la SPPEF !

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