Sites & Monuments a formé, de concert avec l’association Monts14, un recours gracieux contre le permis de construire délivré le 12 juillet 2019 permettant la surélévation de 23 m de la tour Montparnasse (voir ici).
La maire de Paris a rejeté, le 16 octobre 2019, cette demande de réexamen de son permis au motif que « les dispositions de l’article UG.10.1 4e du règlement du PLU de Paris permettent une telle surélévation » et que l’« erreur manifeste d’appréciation au regard de l’impact sur les principales perspectives parisiennes » n’est « ni suffisamment étayée, ni fondée sur les dispositions du règlement du PLU de Paris ».
Il convient, en préambule, de souligner que cette possibilité de surélévation - applicable à toutes les constructions parisiennes - est issue de 2 modifications récentes du PLU. La première, intervenue en 2009, permet un « dépassement de hauteur » en la faveur des « dispositifs destinés à économiser de l’énergie ou à produire de l’énergie renouvelable dans les constructions, tels que panneaux solaires thermiques ou photovoltaïques, éoliennes, toitures végétalisées, rehaussement de couverture pour isolation thermique... » ; la seconde, intervenue sous l’actuelle mandature, en 2016, précise qu’« il en est de même des équipements et serres de production agricole installés sur les toitures ».
Pourtant, comme le précise l’article UG.10.1 4e, ces dérogations aux règles de hauteur se font sous réserve du « respect des dispositions de l’article UG. 11 » du PLU, prévoyant que « L’autorisation de travaux peut être refusée [...] si la construction [...] par sa situation, son volume, son aspect [...] est de nature à porter atteinte [...] à la conservation des perspectives monumentales. » La municipalité semble l’oublier, volontairement...
Pourtant, la Mission régionale d’autorité environnementale (MRAE) constate, à propos de la serre de production agricole, qu’« Au-delà du symbole, il est pour la MRAE nécessaire que cette sur-élévation de la Tour Montparnasse soit mieux justifiée. En effet, l’état initial relève que la Tour Montparnasse est d’ores et déjà disproportionnée par rapport à son environnement. » (p. 13). Elle précise en outre que « l’éclairage spécifique de sa coiffe (enserrant la serre agricole), renforcera la présence de la Tour Montparnasse en hauteur dans le ciel parisien » (p. 14).
Or, il est évident que la tour, déjà trop visible, le sera plus encore une fois surélevée de 23 m, soit de l’équivalent d’un immeuble haussmannien. Rien ne vient d’ailleurs justifier cette nouvelle atteinte aux perspectives parisiennes. Du point de vue de l’écologie, les arbres représentés sur le permis délivré ne disposeront que de 80 cm d’épaisseur de terre, sur à peine 30% de la superficie d’un étage (occupé essentiellement par les différents dispositifs d’accès à la "serre").
L’erreur manifeste d’appréciation de la mairie dans la délivrance du permis se comprend d’autant plus que la hauteur des édifices, dans cette partie du 15e arrondissement de Paris, est en principe limitée à 31 m, même si la tour bénéficie d’un droit acquis au maintien de ses 109 m... Il s’agit cependant d’une norme de hauteur totale pour le quartier, proche des 23 m de la seule surélévation autorisée par le permis !
Précisons enfin que les propriétaires de la tour sont libres de convertir ses 7 - actuels - derniers étages en « serre de production agricole », si leur engagement au service d’une écologie-gadget est sincère, l’important étant de ne pas surélever un édifice déjà beaucoup trop imposant !
Julien Lacaze, Président de Sites & Monuments
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