LeMonde.fr du 21 février 2015 : Roland-Garros sera-t-il prêt pour les Jeux olympiques de 2024 ?

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Le suspense persiste à Roland-Garros. Pas sur le court, où Rafael Nadal l’a tué il y a déjà un bon bout de temps, mais au sujet de l’extension du site qui accueille chaque année, à la fin du printemps, le tournoi parisien. Alors que la partie semblait sur le point de s’achever, elle vient de connaître un rebondissement qui pourrait la faire durer encore un peu.

Les deux adversaires sont connus : d’un côté, la Fédération française de tennis (FFT), qui aimerait pouvoir construire un nouveau court de 5 000 places dans le jardin voisin des serres d’Auteuil, ce qui nécessiterait le déménagement d’une partie d’entre elles – mais pas des grandes et magnifiques serres de Formigé.

De l’autre, plusieurs associations telles que VMF (Vieilles Maisons françaises), la SPPEF (Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France) ou IDFE (Ile-de-France Environnement), qui refusent que, sous prétexte que Rafael Nadal et Cie viennent jouer à la baballe deux semaines par an dans le secteur, on ampute le jardin d’une partie de ses serres.

Après des nombreux échanges âprement disputés, la FFT pensait se voir enfin délivrer les permis de construire début 2015, lesquels devaient déboucher sur l’inauguration du "court des Serres" en 2017, et celle du toit rétractable sur le court central en 2019. Au lieu de ça, elle a vu lui tomber dessus un rapport d’une cinquantaine de pages, réalisé à la demande de la ministre de l’écologie, Ségolène Royal, qui lui donne aujourd’hui des bouffées de chaleur.

Ledit rapport, rédigé par le conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), n’apporte pas d’informations nouvelles. Il « conclut à la faisabilité technique de la couverture de l’autoroute » A13 préconisée par les associations, indique qu’« aucun obstacle juridique ne s’oppose à la réalisation du projet alternatif » à celui de la FFT, et rappelle que si la couverture de l’autoroute coûtera cher, cette dépense sera compensée : pas besoin de construire un nouveau court à côté des serres, il suffira de surélever l’actuel court n° 1 – que la Fédération française veut détruire.

« DÉMARCHE DILATOIRE »

Gilbert Ysern, directeur général de la FFT et patron du tournoi, est furieux : « Oui, c’est sans doute faisable de couvrir l’A13, mais de la même façon, je peux demander, demain, un rapport qui prouve que c’est faisable de démonter la tour Eiffel et la reconstruire chez moi, à Narbonne. Mais est-ce que cela aurait du sens ? »

Le principal problème posé par le rapport se trouve dans sa conclusion : « En tout état de cause, conformément aux orientations fixées récemment visant à développer la démocratie participative en matière d’environnement, il serait nécessaire que les différentes options possibles fassent l’objet d’études à un niveau suffisant pour pouvoir être comparées objectivement et en toute transparence. »
« On ne peut pas s’empêcher de penser que nous nous trouvons devant une démarche que je qualifierais de dilatoire, analyse Gilbert Ysern. C’est un rapport qui a été conduit en quatre ou cinq semaines. Pour mémoire, nous, cela fait cinq ans que nous travaillons sur notre projet. (…) Je ne veux pas croire que cela aura un impact sur le calendrier. »

Cela n’est pourtant pas impossible : la délivrance des permis de construire ne sera possible qu’une fois obtenue la signature du ministère de l’écologie. Or, Ségolène Royal – par ailleurs résidente du quartier – ne semble pas pressée de voir le projet de la FFT aboutir.

SÉGOLÈNE ROYAL CONTRE LA PAIRE HIDALGO -KANNER

On s’oriente vers un beau match entre l’ancienne candidate à la présidentielle et Patrice Kanner, ministre des sports, qui goûte autant que Gilbert Ysern le nouveau délai qui risque d’être imposé à la FFT : « Il n’y a aucune raison pour que l’extension de Roland-Garros soit bloquée. C’est un projet qui respecte l’environnement, facilite la circulation des spectateurs et se tient financièrement. Ségolène Royal a une analyse un peu différente en termes d’alternative au projet, mais il y a des délais à respecter. Et aujourd’hui, le plus large consensus penche en faveur du projet porté par la FFT. Je demande à ce que les choses avancent vite. »

Ségolène Royal aura face à elle un autre adversaire de poids, puisqu’Anne Hidalgo soutient également le projet de la FFT. La maire de la capitale « s’inquiète du retard pris par ce projet indispensable au maintien de ce tournoi international à Paris » et redoute les « délais extrêmement importants » que risque d’engendrer le rapport du ministère de l’écologie : « Le calendrier de livraison serait alors, au mieux, à échéance 2025 ou 2026. A l’heure où Paris envisage de s’engager dans une candidature aux Jeux olympiques de 2024, un tel retard pris dans l’extension de Roland-Garros serait un très mauvais signal envoyé au CIO. Il réduirait considérablement nos possibilités de l’emporter. J’en appelle à la responsabilité de chacun pour que ce projet, qui a fait le fruit d’une importante concertation et qui participera au rayonnement de Paris et de la France, puisse voir le jour dans le respect du calendrier prévu. »

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