Sites & Monuments a été auditionnée, le 24 septembre 2025, par le "rapporteur pour avis au nom de la commission des Affaires culturelles de l’Assemblée nationale, sur les crédits budgétaires « Patrimoines » de la mission « Culture » du projet de loi de finances pour 2026", en la personne de Jérémie Patrier-Leitus, député (Horizons) du Calvados.
Dans ce cadre, nous avons notamment fait part de la nécessité d’une reprise en main par l’Etat de la fiscalité de la vente à la découpe de nos monuments historiques, comme de celle des bâtiments inclus dans un Site patrimonial remarquable (SPR).
La défiscalisation de ces opérations de lotissement de monuments historiques - qui peuvent être nuisible, comme, dans certains cas, bénéfiques au patrimoine - sont en effet laissées au libre choix des promoteurs depuis la suppression, en décembre 2017, d’un agrément préalable du ministère chargé du Budget rendu sur avis du ministère de la Culture.
Nous demandons le rétablissement de cet agrément préalable. Un courriel récapitulatif, fait à l’issue de l’audition, est reproduit ici, conformément à l’engagement statutaire de transparence des opérations de lobbying de notre association.
JL

Monsieur le rapporteur,
Dans le prolongement de l’audition organisée le 24 septembre sur les crédits budgétaires « Patrimoines » du projet de loi de finances pour 2026, vous trouverez, comme convenu, des éléments relatifs à la vente à la découpe défiscalisée du château de Vaux-le-Pénil (situé en Seine-et-Marne, à 5 km de Vaux-le-Vicomte). Cette opération consiste en la création d’une cinquantaine de logements au sein d’intérieurs précieux, desservis, après déclassement de boisements, par un important parking, le restant du parc étant cédé à part :
La même opération est menée actuellement au château de Pontchartrain (Yvelines) - contentieux en cours - l’une des plus importantes créations de l’art classique français, avec une composition majeure d’André Le Nôtre, naturellement détachée du château afin de réduire les frais de la future copropriété. Un mobilier précieux a été dispersé avant le lotissement en 80 logements du château, tandis que ses décors classés seront définitivement inaccessibles pour le public.

Nous avons consacré deux articles dans La Tribune de l’Art à cette opération de démantèlement défiscalisée :
Les projets de Vaux-le-Pesnil et de Pontchartrain sont menés par Histoire & Patrimoine, filiale du promoteur français Altarea Cogedim.

La technique du façadisme est ici appliquée aux monuments historiques proches des métropoles, ce qui les prive de toute attractivité culturelle et économique bénéfique à la collectivité.
L’idée serait, par conséquent, de conditionner, en cas de vente à la découpe, l’accès pour les promoteurs immobilier à la fiscalité Monument historique à un agrément préalable du ministre des Finances rendu sur avis du ministre de la Culture.
Cet agrément, qui existait depuis 2008, a été supprimé en décembre 2017 dans le cadre d’une loi de finances rectificative (à la suite d’une probable action de lobbying). Une analyse des travaux parlementaires des deux lois est disponible ici : s_m_227_-_j._lacaze_-_vente_a_la_decoupe_des_monuments_historiques.pdf.
Il s’agirait de réserver, à nouveau, la défiscalisation des ventes à la découpe aux seuls cas choisis par la puissance publique (et non plus uniquement par les promoteurs). Nous faisons la même proposition de « fléchage » de l’avantage fiscal concernant la défiscalisation « Malraux », quitte à en majorer le taux : s_m_227_-_j._lacaze_-_vente_a_la_decoupe_des_monuments_historiques.pdf. Cela ne peut que contribuer à l’assainissement de nos finances publiques.
Vous trouverez ici notre proposition d’amendement :
Notez que la possibilité d’opérer une vente à la découpe concomitamment à une protection au titre des monuments historiques - innovation de la loi de décembre 2017 - est conservée dans cet amendement. Le texte antérieur à décembre 2017 imposait, en revanche, que la protection au titre des monuments historiques ait lieu "au moins douze mois avant la demande d’agrément". Il peut pourtant être utile d’accéder immédiatement à la défiscalisation pour sauver un bâtiment en état de péril imminent (cas de la caserne Gudin de Montargis : À Montargis, tout est bien qui finit bien pour la caserne Gudin grâce à "notre" instance de classement ! - Sites & Monuments).
Un blocage au rétablissement de cet agrément préalable se situerait, d’après La Tribune de l’Art, au niveau du ministère des Finances :
Bercy protège la vente à la découpe des châteaux - La Tribune de l’Art
Je reste à votre disposition en vous priant d’agréer, Monsieur le rapporteur, l’expression de ma respectueuse considération.
Julien Lacaze, Président de Sites & Monuments - SPPEF